Jeudi 22 avril 2021 -20h GOLDBERG EN LIBERTE

GOLDBERG EN LIBERTE

Variations sur Bach et plus encore

Sylvain JAUDON – Mario STANTCHEV

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Concert enregistré et diffusé en direct  le jeudi 22 avril 2021 à 20 heures                  live streaming Thursday 22 avril 8 pm

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Lepotcommun                                                                                                                                                Lepotcommun

 

GOLDBERG EN LIBERTE
Variations sur Bach et plus encore

En ces temps de pandémie, nous nous efforçons tous de respecter les règles prescrites pour le bien de la communauté tout en les interprétant à titre personnel, afin de préserver un espace de liberté qui nous est nécessaire, sinon vital.

Il en va de même dans le domaine artistique. Prenons l’exemple de Jean-Sébastien Bach, un des compositeurs et théoriciens les plus rigoureux, que nous ne pouvons pas suspecter d’enfreindre de façon sacrilège les lois qu’il a défendues sa vie durant. Et pourtant …

Dans ses Variations Goldberg (un des principaux chefs-d’œuvre de la musique occidentale), Bach nous donne à entendre que rigueur formelle et liberté d’inspiration s’alimentent l’une et l’autre. Et tout de suite nous pensons à ces musiciens improvisateurs qui, d’une série de contraintes, font naître des mondes libres où l’âme est en prise directe avec l’instant musical.

 

A première vue, ces Variations forment une musique très savante, composée d’une aria (rejouée à la fin de l’œuvre) et de trente variations utilisant des canons, des contrepoints, et des fugues, bref tout un univers musical très réglementé dans lequel l’auditeur peut, « sur le papier », se sentir un peu à l’étroit. Bach y explore tout ce que la technique de clavecin de son époque permet.

Mais quand on écoute cette œuvre sans à priori, ce qui frappe est l’extraordinaire liberté de ton, la créativité extrême, le langage ludique, dansant et inattendu. Songeons un instant que cette œuvre monumentale est en fait basée sur un simple canon de huit notes qui servira de point de départ à la basse ! Là encore ça nous rappelle le talent des musiciens de jazz qui, dans leurs improvisations, transfigurent une petite chanson de music-hall ou font d’une simple grille de blues un univers à part entière.

L’imagination de Bach (son nom signifie le ruisseau en allemand) se révèle ici sans limite, débridée, et c’est bien un sentiment libérateur qui envahit l’auditeur après l’écoute.

La liberté, c’est ce que vit aussi l’interprète de ces variations.

Ne nous y trompons pas, jouer l’œuvre telle que Bach nous l’a léguée lui ouvre de nombreuses perspectives, l’obligeant / lui permettant des choix cruciaux : choix de l’instrument (le clavecin d’époque ou le piano moderne), choix des tempi, des nuances, des articulations, des ornementations, des registres, de faire ou non les reprises, mais aussi et surtout des choix d’expression pour chaque variation, qui peut être envisagée de multiples manières tant Bach a été à juste titre avare d’indications. C’est ce champ des possibles qui permet à l’interprète d’affirmer sa liberté.

Dans la première partie du concert de ce soir, Sylvain Jaudon sera donc libre de son regard sur cette oeuvre. Pour reprendre la terminologie des anciens, sa vision en sera peut-être apollinienne (privilégiant l’ordre) ou dionysiaque (privilégiant le plaisir), ou les deux (!), Bach laissant le choix à l’interprète, comme l’indique le texte écrit en exergue de la partition : « Exercice de clavier consistant en une Aria avec différentes variations pour le clavecin à deux claviers. Composé à l’intention des amateurs pour la récréation de leur esprit par Johann-Sebastian Bach ».

En tant que compositeur et improvisateur, Mario Stantchev a basé sont travail musical sur cette expérience de la liberté. Pianiste de jazz de renommée internationale, nourri de musique baroque, mais pas seulement (ayant aussi assimilé diverses esthétiques et techniques musicales postérieures), nourri également par les richesses rythmiques et mélodiques des pays d’Europe centrale, Mario se fera en deuxième partie de soirée le chantre de cette liberté. Il nous propose une expérience musicale qui entrera en résonnance avec l’univers de Bach et son époque. Il tissera des liens à travers le temps et les esthétiques. Nul doute que son talent nous donnera à entendre une musique que le grand improvisateur visionnaire qu’était Bach ne renierait pas.

Et là aussi apollinien et dionysiaque se mêleront car il n’est pas de liberté possible sans un cadre certain !

Jean-Noël REGNIER