Dès le premier Festival de jazz de Sofia (1977), Stantchev occupe le devant de la scène. Ses compositions et solos de l’album Simeon Shterev Quartet, sorti la même année, le confirment. Sa composition pour piano, ensemble à vents et percussions, Portraits (Fats, Blues, Miles, Chick), jouée au troisième Festival de jazz de Sofia (1979) sous la direction du chef de la Philharmonie de Sofia, fait événement, mais face au succès croissant s’élève une barrière infranchissable : l’interdiction, par les autorités, de voyager à l’étranger. Le pianiste, blessé moralement et freiné professionnellement, décide de quitter la Bulgarie. Son évasion, à l’automne 1980, est digne d’un roman d’espionnage : « commando » français réuni par sa mère (qui est retournée vivre en France, son pays d’origine), «vrai-faux» passeport (celui d’un journaliste de Libération, Bertrand Hertz), rendez-vous clandestins, mots de passe, maquillage… Le festival Nancy Jazz Pulsation lui offre son premier concert en solo en France et des premières parties du Dexter Gordon Quartet et de Mal Waldron ‑ grand honneur pour ce « jeune pianiste venu du froid », comme se plaisent à le qualifient les journaux lorrains. En 1982, il s’installe à Lyon et commence à fréquenter les scènes de la ville, en solo ou avec son Multidirectionnel Trio (Hervé Czak à la contrebasse). Il est remarqué dans un des clubs lyonnais par le directeur du tout nouveau Jazz à Vienne, Jean-Paul Bouteiller, qui le programme in extremis en « avantpremière partie » de Dizzy Gillespie. Il y retournera de nombreuses fois, dont deux sous son nom, sur la grande scène. La même année, il gagne le premier prix du Concours international de la ville de Lyon. Parallèlement, il enseigne, et fonde le département de jazz du Conservatoire de Lyon d’où sont sortis nombre de pianistes de la nouvelle génération. Son activité pédagogique (à Lyon, mais aussi au conservatoire de Metz et à l’IMFP de Salon-de-Provence) l’amène à publier trois méthodes originales sur le jazz (en collaboration avec Armand Reynaud). Il anime par ailleurs des master class, dans le cadre de festivals prestigieux, ou bien (à l’invitation de David Liebman, président de l’IAJE, l’historique Association internationale d’enseignement du jazz), à la New School de New York. Interprète et compositeur apprécié des musiciens, il est à de nombreuses reprises l’hôte de France Musique, et notamment celui de l’émission consacrée aux pianistes de Martial Solal, qui, par deux fois, l’appelle au jury du Concours international de pianistes de jazz de la ville de Paris. En 1984, Stantchev enregistre son premier album sous son nom en France, Un certain parfum. Dans le rôle des sidemen : Daniel Humair et Mike Richmond. L’album reçoit des critiques qui frôlent les superlatifs ! Du milieu des années 80 et pendant une dizaine d’années, ses travaux reflètent sa curiosité pour des expressions musicales très diverses : • trio avec Riccardo Del Fra et Peter Gritz ; quartet avec Daniel Humair, Riccardo Del Fra et Enrico Rava ; • Mario Stantchev Quartet avec Laurent Blumenthal, Gil Lachenal et Alain Dumont ; • un groupe original, Ayodhya, axé sur les musiques traditionnelles, bulgare et du monde, formation non conventionnelle avec piano acoustique, guitare acoustique, saxophone soprano et nombreuses percussions classiques et traditionnelles ; • duo avec Michel Perez : nombreux concerts et un disque Perez-Stantchev, Duo ; • sessions d’enregistrements (sous l’égide de l’AIMRA et avec la collaboration de François Lubrano), à Paris et à New York, avec Michel Perez, Ron Carter, Billy Drummond, Jean-Louis Almosnino, Jay Anderson, Adam Nussbaum… ; • commandes de musique et de créations pour des ensembles de musique contemporaine : 2E2M de Paul Méfano et Claude Ballif, l’ensemble Intervalles avec le trio de voix féminines corses Donninsulana, etc. 1989, chute du Mur de Berlin, effondrement du bloc communiste. Le nouveau régime bulgare s’empresse d’inviter Mario Stantchev, considéré jusqu’alors comme «traître à la patrie» et resté pendant dix ans absent du pays, pour un grand concert dans l’énorme et clinquant Palais de la culture de Sofia. Il y joue en trio devant une salle qui salue avec enthousiasme le retour du fils prodigue. Au premier rang se trouve la moitié du nouveau gouvernement… S’ensuivent tournée dans le pays, interviews, télés, radios… Et depuis, il joue régulièrement dans sa première patrie avec des musiciens bulgares et occidentaux. La période 1994-2007 est essentiellement dominée par son travail avec le Mario Stantchev Sextet : 200 concerts, avec des tournées en France, Allemagne, Italie, Maghreb, les festivals de Nancy Jazz Pulsation, Jazz à Vienne, Bitonto…, deux albums (Priyatelstvo et Kukeri), un film pour Mezzo au Festival d’Assier… L’ambition de Stantchev d’allier une écriture sophistiquée à une ambiance festive a manifestement porté ses fruits, et durant ses treize ans d’existence, le Sextet est régulièrement accueilli avec chaleur par le public et la critique. Les membres de cette formation au son « coloré et généreux » : Michel Barrot (trompette et bugle), Roger Nikitoff (saxophones), Francesco Castellani (trombone), Gérard Guérin ou Didier Del Aguila (basse), et Alain Couffignal ou Jean-Luc Di Fraya (batterie). Les années 2007–2014 voient naître de nouveaux projets : • Mario Stantchev New Trio, avec Didier Del Aguila (b) et Roland Merlinc (dm) ; • concerts (2011, 2012) avec Theodosii Spassov (kaval – flûte bulgare) ; • Mario Stantchev Bulgarian Trio avec Vesselin Vesselinov (b) et Dimitar Semov (dm) ; • trois projets autour de la musique classique : 1) Duo complice, avec le pianiste-concertiste Alain Jacquon, sur la musique de Chopin et Liszt ; 2) Goldberg… or not avec le pianiste-concertiste Samuel Fernandez, autour des Variations Goldberg de Bach (concert et disque par Baroque et plus) ; 3) Multidirectionnel Duo avec le flûtiste Michel Lavignolle (édition chez Robert Martin de Quatre réminiscences d’après Gershwin et Trois pièces pour flûtes et piano, de Mario Stantchev) ; • Trio Perfetto (avec Francesco Castellani, trombone ; Philippe Petrucciani, guitare) ; • Duo piano-orgue Stantchev-Truchot ; • Trio Origines avec Lionel Martin (saxophones) et Jean-François Baëz (accordéon) ; • Duo piano-saxo Mario Stantchev-Lionel Martin : enregistrement en juillet 2014 du répertoire courant du duo; • au printemps 2014, invité à la Radio de Plovdiv par Vesselin Koychev (guitariste) en tant que soliste, il a joué, accompagné d’une chorale folklorique de 32 jeunes filles. • Salyon de musique : depuis 2008, une fois par mois, Stantchev “fait salyon” chez Yves Dugas, facteur de pianos (Lyon Music) et indéfectible soutien : l’occasion de faire écouter son travail à un public de fidèles admirateurs ; • New Bulgarian Trio avec Dimitar Karamfilov (b) et Hristo Yotsov (dm). Album Autumn Leaves in Sofia enregistré à l’automne 2013 ; En mars 2014, l’Opéra de Lyon a accueilli Mario Stantchev pour une résidence d’une semaine. En cinq concerts, il a présenté quelques-unes des différentes facettes de son travail, invitant à cette occasion, outre des complices des projets cités ci-dessus (Lionel Martin, Hristo Yotsov…), Louis Sclavis, Stoyan Yankoulov, Laurent Blumenthal… • Gottschalk : fin 2014 aura lieu l’enregistrement pour le label Cristal d’un projet original autour de la musique du compositeur américain Louis Moreau Gottschalk (1829-1869).  » Parvenu à un stade de maturité très discrètement insolent – le risque devenu joie – Mario Stantchev déploie une matière colorée dont la structure vive est le dosage constant des variations, servi par un art très subtil de la profondeur de champ, de la conduite du récit et des textures.  » Jazzman